Conception d'un nouveau gaz [Gordy Davenport]

Un coup d’œil à gauche, un coup d’œil à droite. Un autre coup d’œil à gauche, parce qu’on ne sait jamais.
Gordy avait commencé son nouveau travail de concierge, mais Shinsekai ne semblait pas sale… Pour l’instant. La directrice le poursuivait quand même pour il ne savait quelle histoire en rapport avec un élève qui aurait fait vomir toute une classe par une crise de son pouvoir. La fameuse excuse « l’équipe de nuit s’en chargera » ne semblait pas avoir marchée ; il n’y avait peut-être pas d’équipe de nuit. Il tentait donc d’échapper le plus longtemps à la directrice et à une salle remplie de vomi. Il était actuellement dans les couloirs du deuxième étage, cherchant où il pourrait aller pour disparaitre.
Ne connaissant pas encore très bien l’école, les cachettes ne lui venaient pas immédiatement à l’esprit. Il lui fallait donc fuir constamment pour réduire ses chances de croiser quelque membre de la direction que ce soit.
Soudain, il entendit un bruit quelques mètres devant lui. Il se jeta d’une roue élégante dans un couloir secondaire, vestige de son enseignement de ninjanitor. Il passa sa tête dans le couloir principal ; personne ne vue. Le bruit n’était donc pas celui d’une porte qui s’ouvre, comme il l’avait cru… Mais celui d’une porte qui se ferme. La salle de biologie semblait avoir été l’origine du bruit. Gordy réfléchit une seconde. Cela pouvait être un piège ; de quoi étaient capables des adolescents investis du pouvoir d’être ses patrons ? D’un autre côté, cela pouvait être n’importe quel élève, qui, lui, connaitrait peut-être un endroit où se cacher. Qui sait ; peut-être même que la salle de biologie était l’endroit idéal pour faire profil bas ?
Après cette courte hésitation, il décida d’entrer dans la salle. Il allait sortir de son couloir parallèle, puis stoppa son mouvement : un coup d’œil à gauche, un coup d’œil à droite. Un autre coup d’œil à gauche, parce qu’on ne sait jamais. La voie étant libre, il se dirigea vers la salle de bio. Il lui semblait avoir entendu une clé tourner dans la serrure ; il fit donc apparaitre le trousseau de clé de l’établissement, qui portait plus de clés qu’il ne pouvait en compter (ce n’était pas forcément incalculable, mais Gordy n’avais jamais aimé les maths), déverrouilla la porte, s’apprêta à attacher le trousseau à sa ceinture avant de se rendre compte qu’il en avait déjà fait apparaitre quatre un peu plus tôt, mit quelques secondes à trouver là où l’accrocher, et ouvrit enfin la porte.
C’était la première fois qu’il voyait la salle de bio ; c’était aussi l’une des premières salles qu’il visitait. Immédiatement, deux instincts entrèrent en contradiction : la salle était sale (hahaha… la salle était sale) en quelques endroits, et méritait bien trois bonnes heures de nettoyage pour en enlever les tâches de moisissure (à moins que ce ne soit un autre produit chimique mystérieux) ; mais d’un autre côté… il ferait bien une sieste.
Le plus étrange était qu’il n’y avait personne. La salle était entièrement vide. Au milieu, un mannequin bien étrange avait été laissé en plan. Gordy n’en avais jamais vu de semblable ; on aurait pu le comparer avec un samouraï, mais aussi avec un robot. Probablement un projet de technologie… Mais pourquoi était-il ici ? Bah, après tout, Shinsekai abritait des élèves particuliers… L’un d’entre eux tentait peut-être d’huiler son robot avant de le présenter. Il avait peut-être besoin d’aide ?! Gordy s’apprêta à appeler qui voulait l’entendre, mais se retint d’un coup – à nouveau, deux instincts entrèrent en contradiction.
Il tenait absolument à aider cet élève ; après tout, les produits chimiques étaient probablement dans un placard fermé à clé, et sans ça, peut-être aurait-il une mauvaise note… ! Mais, d’un autre côté… s’il criait et que la directrice l’entendait, il ne pourrait pas aider l’élève, et devrait en plus racler du vomi. La perspective ne l’enchantait pas réellement.
Sa conscience se réveilla d’un coup. Comment pouvait-il se poser la question ? Il devait aider cet élève. Prenant son courage à demain, il lança d’un ton amical :

« Il y a quelqu’un ? Si t’es là en illégalité, ne t’inquiète pas, moi aussi ! Je fuis la directrice, mais, bon, c’est une longue histoire… Enfin bref. Ne parlons pas de moi. Tu peux te montrer ! »

Alors que Gordy continuait à chercher l’élève des yeux, le robot se mit à parler.

- Bonjour. J'... ignore votre nom. Je... m'... m’appelle « SMOG ». Je... ne crois pas être en illégalité selon les normes de l'établissement. Vous vouliez me... voir. Me... voici.

Le concierge se figea et regarda ce qu’il avait cru être un projet de technologie. Ses paupières s’ouvrirent en grand, sa mâchoire tomba ; l’élève lui fit un signe de la main.

- J'ai... besoin d'aide. J'ai... cru comprendre que vous aviez les clés de l'établissement. Je... « suis » arrivé il y a peu. Pouvez-vous m'indiquer où trouver la liste de ces composants chimiques ? Acide Nitrique concentré, Dioxygène à l'état aqueux. Nécessité d'un condensateur et d'un transformateur.

Gordy réfléchit un moment. Il affirmait être celui qui était entré dans la classe ; seulement, il parlait vraiment comme un robot. Comment savoir quelle était la vérité ? Bah. Pourquoi quelqu’un voudrait le duper ? C’était peut-être un test de la part de la directrice, pour voir s’il allait offrir des produits chimiques dangereux à des élèves… Maintenant qu’il y pensait, cela ressemblait de plus en plus à un piège. Il décida que si la réponse évidente au test était de ne pas donner les produits, la véritable réponse devait être qu’il pouvait les lui donner ! De toute façon, si c’était une évaluation de son profil psychologique, il fallait qu’il agisse avec honnêteté ; et sa réaction première aurait été d’offrir tous ces produits à l’élève qui semblait s’y connaitre bien mieux que lui. La réponse la plus logique était donc de tout donner à cet élève.

- Et bah, salut Smog ! Je suis Gordy, l’homme à tout faire de Shinsekai. Bon, pour tes produits, il y en a peut-être dans le placard, au fond de la salle… Sinon, j’ai remarqué une salle de préparation en venant ici (je m’y étais caché) ; il y a sûrement le condensateur et le transformateur. Tous les appareils étaient étiquetés, de toute façon ! Je trouverais probablement ce qu’il faut. Tiens, prend un trousseau, j’en ai plein ; cherche dans le placard, t’as l’air plus calé que moi pour ça. Bon… Je vais mettre ma vie en péril pour aller te chercher tes machines, alors j’espère que ça vaudra le coup ! Si je ne reviens pas. Trouve la salle sans moi… et sache que je veux des funérailles Vikings !

Gordy détacha l’un de ses trousseaux et le jeta vers Smog. Sans regarder s’il l’avait attrapé (le bruit ne pouvait pas l’aider, puisque l’élève faisait probablement le même bruit que le sol), il entrouvrit la porte de la salle et effectua son rituel habituel : un coup d’œil à gauche, un coup d’œil à droite. Un autre coup d’œil à gauche, parce qu’on ne sait jamais. Voyant que la voie était libre, il commença à se diriger vers la salle de préparation sur la pointe de ses pieds, en émettant le moins de bruit possible. Il fit des pas aussi grands que possible de façon à réduire le plus possible les chances de faire un bruit. Cependant, sa démarche avait un potentiel de ridicule impressionnant. Heureusement que le couloir était vide…

Gordy retrouva enfin la salle de préparation. Sur les étagères et les tables, des dizaines d’appareils en tous genres s’étalaient. Des étiquettes définissaient le nom de chacun d’entre eux. La chasse était lancée : un condensateur et un transformateur, un condensateur et un transformateur… Mais à quoi est-ce que ça peut bien ressembler ? Enfin, parmi des boites remplis de divers appareils mystérieux, Gordy trouva ce qu’il cherchait. Deux boites étiquetées « condensateurs » et « transformateurs ». Ravi, mais embêté, il fit apparaitre un chariot pour transporter ses trouvailles et se dirigea vers la salle de biologie, pour aider Smog à faire… qu’est-ce qu’il voulait faire déjà ? Il faudrait lui demander, peut-être… bah. Sûrement quelque chose de sympathique, de toute façon…

Gordy jetait des coups d’œil autour de lui en poussant son chariot vers la salle de biologie. Une chance que personne ne se trouve dans le couloir ! Il aurait eu du mal à expliquer ce qu’il faisait. Déjà que lui-même ne savait pas exactement ce qu’il faisait, alors… La porte de la salle de biologie lui apparut enfin. Il l’ouvrit avec un grand sourire.

- OK Smog, alors j’ai réussi à trouver ce que tu deman…

Un soudain mal de crâne le prit ; il s’effondra en se tenant la tête à deux mains. Mais, aussi vite qu’il était arrivé, il repartit, et Gordy put rouvrir les yeux. Son chariot avait disparu, et les boites étaient tombées par terre. Il les ramassa hâtivement et les posa sur une paillasse.

- Heu… tu saurais pas ce qu’il s’est passé, par hasard ? Parce que mon chariot aurait pas dû disparaitre avant une heure, donc heu…

Soudain, il se rendit compte que quelque chose manquait. Il ne sentait plus le poids des trousseaux de clés à sa taille. Il baissa alors les yeux, mais… Où étaient passée sa tenue ?! Il était désormais en caleçon, et n’avait aucune idée du pourquoi. Relevant les yeux, il découvrit que Smog avait trouvé ce qu’il cherchait ; seulement, une énorme bonbonne de gaz, qui n’avait rien à faire là, trônait sur la paillasse. Plissant les yeux, Gordy lu l’étiquette collée dessus.

- Gaz inhi… GAZ INHIBITEUR DE MAGIE ?! WAAAAAAAH ! D’OU EST-CE QUE TU SORS CA ? CA VA PAS DU TOUT ! Bon, en soit ça explique pas mal de choses, mais… Bon, on va devoir trouver un moyen d’empêcher les autres élèves de respirer ce truc, et vite ! T’imagines pas les conséquences que ça pourrait avoir ! Et puis, d’où est-ce que tu sors ce truc, d’abord ? Haaaaaaaaaa, je sais plus quoi faire sans ma magie !

Le gaz expliquait clairement la disparition de son chariot et de ses vêtements. En effet, lors de sa fuite pour éviter de nettoyer une salle plein de vomi, son uniforme avait été fortement endommagé ; Gordy l’avait donc jeté dans une poubelle et fait apparaitre un autre. Il se demanda soudain si le gaz avait un effet permanent ; prit de panique, il tenta de se faire apparaitre un nouvel uniforme, mais peu importe ses efforts, aucune tenue de concierge n’apparaissait. Le gaz lui avait retiré tous ses pouvoirs… Il n’était plus qu’un concierge normal. En caleçon.

Gordy regarda Smog. Cet élève semblait en savoir plus long que lui sur beaucoup de choses, notamment la chimie ; si quelqu’un pouvait le sortir de ce pétrin, c’était bien lui. En y réfléchissant à deux fois, c’était même de sa faute s’il était en caleçon au milieu d’une école (situation qui aurait probablement un impact sur la vision que ses supérieurs auraient de lui) ; le cyborg devait l’aider ! Le regard du concierge s’endurcit pour redevenir celui d’un ninjanitor.

- Bon… Vu que t’as l’air de t’y connaitre en chimie et tout, tu vas m’aider et régler ce problème, ok ? Je t’ai amené tes machins-bidules pour faire le truc que tu voulais faire (c’était quoi, d’ailleurs ?), alors tu vas AUSSI t’en servir pour me rendre mes pouvoirs, et empêcher qui que ce soit d’autre d’être affecté ! Sinon, on va vraiment être dans un sale pétrin, toi et moi… et je veux pas aller nettoyer le vomi de 20 élèves différents !

Smog affirmait qu’il devait rester dans la pièce afin de protéger le reste du bâtiment, et avait aussi parlé d’un gaz qui pourrait être mortel. Lorsqu’il avait demandé à Gordy de quitter les lieux, il fut ravi de la proposition.

- Ca me gêne de te laisser ici alors que t’es juste un élève, mais, bon… s’il n’y a pas d’autre choix… Je te souhaite un bon courage !

Une fois ce beau discours prononcé, Gordy sorti de la salle d’un pas décidé, referma la porte, et prit un temps d’arrêt. Puis il courut sans prendre le temps de jeter un coup d’œil à gauche, un coup d’œil à droite, et un autre coup d’œil à gauche au cas où. Il ne cria pas, mais ses yeux reflétaient la peur de mourir que cet élève-machine lui avait procuré. Comment pouvait-il être aussi courageux ? « Ces gaz sont mortels, je vais rester me baigner dedans », oui, bien sûr ! Soudain, Gordy se souvint de sa dernière volonté. Il devait colmater la salle avec des outils qui n’étaient pas magiques… Où pouvait-il trouver ça ? Impossible de demander à Tina, elle le jetterait d’abord dans la salle pleine de vomi… qui, d’ailleurs, devait maintenant empester. Peut-être que dans la remise du prem…

– Heu… Je suis pas en caleçon, là ?

Gordy s’arrêta de courir. Il baissa les yeux pour vérifier l’information, et put apercevoir les cœurs rouges sur fond blanc de son sous-vêtement. Il tenta de faire réapparaitre sa tenue, mais ses pouvoirs ne fonctionnaient pas encore. Il prit alors la direction de la remise du premier étage de manière plus discrète, espérant qu’aucun élève ne trainerait dans les couloirs. Par chance, il ne croisa personne (bien qu’il entendu Tina crier son nom, ne l’évitant qu’en se jetant de la fenêtre pour atterrir dans un buisson). La remontée vers la remise fut plus dure, car des élèves flânaient devant l’entrée. Heureusement, connaissant l’entrée de service, il put s’infiltrer dans le bâtiment et atteindre la remise.

– Pas ça, pas ça, pas ça… Ho, du gros scotch ! Bon, bah… espérons que ça pourra le faire.

Gordy s’empara du rouleau de chatterton et repris la direction de la salle de bio. En arrivant devant la porte, il prit une profonde inspiration, puis retint son souffle pendant qu’il scotchait et rescotchait, et rerescotchait encore les interstices, de peur que le gaz ne s’échappe. Il scotcha aussi la serrure, par précaution. Rassuré, il relâcha la pression et avala de l’air. Il retourna à une position moins exposée au possible regard d’un supérieur et laissa ses pensées vagabonder.

‘Bon sang, c’est qu’il fait froid dans ces couloirs quand on est presque nu…’

Il sentit soudain un poids sur ses épaules. Se retournant d’un coup de peur d’avoir été repéré, il n’aperçut personne derrière lui. Le poids, cependant, était toujours présent. Cette école pouvait contenir n’importe quoi… Gordy baissa doucement les yeux vers ses épaules pour y apercevoir… Sa tenue de concierge. Ses pouvoirs étaient revenus ! Il voulait avoir plus chaud, et sa tenue était réapparue. Ha, quel soulagement… Fier d’être enfin habillé, pas seulement de vêtements, mais de ses pouvoirs qui, désormais, le définissait, il se prit l’envie de les utiliser. Ses pas le menèrent d’eux-mêmes vers la salle sinistrée de vomi, afin qu’il réalise son devoir, son rôle qu’il possédait depuis l’enfance… nettoyer afin de rendre la vie agréable aux autres.



JEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEJ



RP fini pour moi, Smog je te laisse conclure si t’as un truc à rajouter (genre ce qu’il se passe dans la salle), sinon bah voilà :p Voilà voilà Joyeuse Pâques tout le monde